Depuis plusieurs années, des citoyens sensibles à la cause environnementale ne cessent de tirer la sonnette d’alarme sur la dégradation de nos aires protégées. Les écologistes sont de plus en plus préoccupés, les débats deviennent récurrents sur la toile. C’est dans ce contexte que l’émission Haïti Climat a reçu intra muros le jeudi 22 avril 2021, Bruno Mentor, directeur exécutif de la Fondation Macaya, autour du thème « SOS pour le Parc Macaya ».
Considéré actuellement comme un bien commun mondial, le Parc National Macaya fut créé par un décret datant de 1983. Il s’étend sur 2 000 hectares et se situe dans le massif de la Hotte (deuxième massif le plus important du pays), en califourchon entre le département Grand’anse et le Sud. Des études menées par le Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire (CIAT) a permis l’augmentation de la surface du Parc qui est passée de 8 000 hectares en 2013 à 13 000 hectares en 2014.
Déclaré officiellement réserve de la biosphère en 2016 par l’UNESCO, le Parc Macaya reste un immense réservoir de diversités biologiques et d’espèces endémiques.
Il contient la plus grande concentration d’amphibiens endémiques dans le monde et donne naissance à sept des plus grandes rivières du département du Sud et la de la Grand-Anse.
En 1956, l’espace disposait d’une couverture végétale de 100% qui a chuté à 14, 8% en 1978, pour ensuite s’amenuiser considérablement à 3,6 % en 1984. « Aucune autre évaluation n’a été faite depuis […] Je pense que le Parc est peut-être plus dégradé encore après le passage en 2016 de l’ouragan Matthew», a affirmé le directeur exécutif de la Fondation Macaya, Bruno Mentor, avant de préciser que le dernier inventaire biologique a été mené en 1992 par l’Université de la Floride.
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Les activités économiques des riverains dépendent fortement du Parc, a fait savoir Bruno Mentor. Ces derniers l’utilisent à des fins culturales et d’élevage. Pire, de nombreux propriétaires de ces lopins de terres défrichées vivent à l’étranger. « Quoiqu’un arrêté fût publié pour maintenir une gestion contrôlée des terres privées du Parc, il existe un grand écart entre ce décret et les activités entreprises régulièrement au niveau du Parc», a constaté M. Mentor.
Dans la foulée, le directeur exécutif a salué l’intervention de plusieurs fondations dans la gestion du Parc, dont la Fondation pour la Nouvelle Grand’anse et la Fondation Macaya. « De 2014 à 2020, la Fondation Macaya a mis en terre 225 000 plantules de pins à l’intérieur du Parc ». La Fondation Macaya intervient dans le parc depuis plus de 15 ans.
Tant que la population locale vit dans la précarité, grandes seront les répercussions sur le Parc Macaya. Comme sur toute autre réserve biologique d’ailleurs. Pour M. Mentor, le manque d’éducation de la population locale sur son milieu, sur l’importance des sites naturels du pays, constitue toujours un frein à la conservation et à la durabilité de la biodiversité de l’ensemble des aires protégées à travers le pays.
« Il faut faire de la population locale un acteur dans la protection du Parc. Il faut lui permettre d’évaluer ses propres initiatives. Pour pouvoir garder un certain degré de contrôle sur les ressources naturelles», a recommandé Bruno Mentor ajoutant que le rôle de l’Etat, en ce sens, consiste à établir les conditions sociales pour que la communauté puisse avoir accès à d’autres alternatives de subsistance. En guise de recommandation, Bruno Mentor encourage la cogestion ou la gouvernance partagée comme étant l’un des modèles à mettre en avant dans la gestion des aires protégées en Haïti.
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Kattia Jean François