Le jeudi 30 juin 2022, l’urbaniste Rose-May Guignard, l’expert technique en résilience Hansley Charles et l’ingénieur architecte Dieudonné Domond ont été reçus à l’émission Haïti Climat pour parler de la Gestion des Risque et Désastres (GRD) : Expériences des universités haïtiennes dans la construction de la Résilience. Tous les trois avec Rose-May Guignard comme coach ont participé dans un projet visant à impliquer beaucoup plus les universités dans les recherches et actions sur GRD en Haïti.
Ce projet financé par le bureau de Humanitarian Affairs a été réalisé sur trois sites principaux, suivant la coach. Il y a eu d’abord, Derrière industrielle, située à Jérémie dont le problème se porte sur une population vivant dans une zone côtière. Puis, Cité Canada, haut Turgeau avec une problématique en eau potable. Et le site de Sainte-Marie sur le problème d’érosion de sol. Appui institutionnel aux deux universités participant au projet, à savoir l’Université Quisqueya et la Faculté des Sciences (FDS) de l’Université d’État d’Haïti (UEH), Formation et Recherche, forment les trois piliers de projet au cours duquel, pas mal d’expériences sont acquises, de bonnes pratiques et leçons sont apprises.
L’urbaniste Rose-May Guignard par exemple, a découvert les compétences et la volonté des étudiants haïtiens. « Les étudiants haïtiens ont de la capacité lorsqu’ils reçoivent de l’encadrement et de la formation », a affirmé la coach. « Ils ont montré qu’ils sont capables de faire beaucoup avec leur moyen limité », a-t-elle ajouté. Dieudonné Domond, qui a travaillé sur le site Sainte-Marie, une communauté divisée en sept quartiers, a estimé que la population avait la volonté de participer dans l’identification des risques de leur zone. Cette dernière avec un sol calcaire friable est risquée au glissement de terrain ou éboulement, selon M. Domond.
« La nature de ce sol ne favorise pas la construction », a fait savoir l’ingénieur architecte. Optant pour une méthode écologique et biologique pour gérer les risques et désastres dans le cadre de ce projet, pour diminuer ce risque, le système « earthship » était au rendez-vous. Un système d’après l’ingénieur Domond qui consiste à utiliser des pneus usés pour construire des murs de soutènement pour consolider l’espace. Une utilisation qui diminue l’empreinte carbone, selon M. Domond.
Hansley Charles, lui, comme toute l’équipe a opté fortement pour la participation de la population. Il croit que la communauté doit participer tant à l’identification des problèmes qu’à leur exécution. « Impliquer la communauté le plus que possible », a-t-il exigé. « Le projet doit être réalisé pour, par, et avec la communauté », a-t-il ajouté. Pour apporter une réponse efficace et efficiente, M. Domond a estimé qu’il est nécessaire de faire la mise en commun des compétences, des moyens disponibles et la collaboration de tous pour arriver à un vrai projet de mitigation des risques.
« La résilience n’est pas seulement de travailler sur les menaces, il faut aussi se pencher sur la situation économique de la population », a conseillé Mme Guignard en prenant en compte les moyens de subsistance des ménages. « Tant qu’on ne gère pas la question économique des ménages qui font face à des chocs extrêmes, on peut tout faire en matière de résilience, peine perdue », a-t-elle signalé. En se basant sur bon nombre de formations et de sensibilisations réalisées en Haïti, Mme Guignard estime que le pays, comparable à 2010, progresse sur la question de tremblement de terre.
Par ailleurs, l’aspect le plus difficile à affronter dans ce sujet, selon elle, c’est lorsqu’il s’agit de demander au propriétaire d’une mauvaise construction de démolir sa maison. « Nous avons besoin de travailler sur la partie la plus dure », a-t-elle exhorté. Autre point crucial dans ce dossier, soulevé par l’urbaniste, qui renvoie au coût et la qualité des matériaux de construction.
Aspect sur lequel Mme Guignard pense qu’il serait nécessaire d’en discuter avec le secteur privé. Alors qu’ils se vendent au prix exorbitant, la qualité de ces matériaux laisse à désirer.« Le fer vendu en Haïti est de mauvaise qualité », a révélé l’urbaniste qui n’a pas voulu entrer dans trop de détails. « Tant qu’on ne gère pas la qualité des matériaux de construction, on restera toujours vulnérable », a-t-elle insisté.
Hansley Charles, pour sa part, a encouragé l’éducation de la population, y compris celle des enfants sur les risques auxquels le pays est exposé. « Il faut comprendre l’espace où l’on vit, et savoir ce que cela implique », a martelé l’expert technique en résilience. De son côté, Dieudonné Domond a ajouté qu’il aimerait que les experts dans le domaine mettent les connaissances à la portée de tous. « Si on n’apporte pas notre soutien, de nouvelles techniques de construction qui seraient capables de contrecarrer les risques, nous n’irons pas trop loin », a prévenu l’ingénieur architecte. Mme Guignard a annoncé qu’une étude portant sur les bonnes pratiques et tous ceux qui fonctionnent en bien en Haïti dans le cadre des projets GRD en général sera bientôt publiée.