Le 20 mai ramène la journée mondiale des abeilles. Une date retenue par les Nations Unies pour attirer l’attention de tous sur leur rôle primordial. Pour l’occasion, Haïti Climat a décidé de faire un gros plan sur Nesly Paul, fils d’apiculteur et apiculteur lui-même, qui entend jouer sa partition dans la lutte contre la menace qui pèse sur les abeilles via son entreprise dénommée « Myèl Lakay/Miel Pur ».
Le hasard n’existe pas, et ce n’est pas Nesly Paul qui dira le contraire. En effet, cette journée mondiale des abeilles 2022 coïncide avec le premier anniversaire du lancement de « Myèl Lakay/Miel Pur », entreprise spécialisée dans la production du miel en Haïti. Ladite entreprise est née d’une conscience écologique et d’une volonté de promouvoir la production du miel dans le pays. « J’ai commencé l’entreprise à partir d’une idée visant à encourager l’apiculture dans le pays », affirme Nesly Paul.
La pollinisation étant un processus fondamental pour la survie des écosystèmes, la survie des abeilles, acteurs clés dans ce phénomène et les autres pollinisateurs, est donc à pérenniser sur la planète. « Les abeilles ont en effet plus que jamais besoin d’être protégées, tout comme les autres insectes pollinisateurs, grandement menacés par les activités humaines », constatent les Nations Unies.
Les abeilles figurent sur la liste des vingt espèces en voie de disparition en Haïti. Basant sur leur rôle écologique majeur, l’apiculteur haïtien estime qu’il est nécessaire de les valoriser. Tout en étant conscient du rôle important que jouent les abeilles dans la biodiversité des plantes à fleurs surtout, Nesly Paul, à travers son entreprise, entend faire la promotion et la distribution de son miel produit localement.
L’’apiculture est un métier que beaucoup d’Haïtiens apprennent à pratiquer sur le tas. Le cas de Nesly Paul n’est pas tout à fait différent. Le jeune apiculteur, qui suit actuellement une formation en ligne sur l’apiculture avec Entreprise et Collectivité du Collège Alma/Canada, aidait déjà son père à extraire le miel depuis son enfance. Outre son père, son parrain est aussi apiculteur. Grandir dans la pratique de l’élevage d’abeille est un très bon atout pour en apprendre du secteur. « J’ai grandi dans le domaine, tout petit je savais beaucoup de choses [sur la pratique de l’apiculture] », a-t-il confié péremptoirement.
Par ailleurs, les variétés de miels vendus sur le marché haïtien ne sont pas tous produits localement. Les revendeurs les achètent assez souvent soit en République Dominicaine, soit aux États-Unis. Selon l’apiculteur, le marché local est envahi de miels importés à cause de la méconnaissance de la population de ce produit. Pour y remédier, Nesly Paul, dans sa lutte pour promouvoir le miel pour en générer plus de consommateurs, souhaite sensibiliser la population sur l’importance du miel et de son comportement face à la température.
Une démarche qui vise, selon lui, à encourager les éleveurs. Le tout, au profit de l’environnement. « J’ai décidé d’utiliser mes connaissances dans le domaine de la communication, des médias et des réseaux sociaux pour valoriser le miel haïtien et d’autres produits apicoles, pour encourager plus d’élevage qui favorise plus d’abeilles dans l’environnement », a fait savoir le journaliste de la radio Lumière, qui a aussi étudié la communication sociale à la Faculté des Sciences humaines (FASCH) de l’Université d’État d’Haïti.
Plus de consommateurs, plus de revenus, certes. Mais, dans ce secteur, le bénéfice ne revient pas uniquement à l’entreprise. L’environnement au passage en est aussi le grand gagnant. « Autant que les consommateurs augmentent, autant que les apiculteurs auront plus d’intérêt à produire le miel », explique-t-il. Donc, plus il y aura d’abeilles, mieux la pollinisation est assurée. En ce sens, l’apiculteur invite les jeunes haïtiens à embrasser le secteur pour une plus grande avancée.
Il y a environ 8 000 familles cultivant le miel en Haïti et le pays produit environ 800 tonnes métriques de miel, soit 140 000 gallons de miel par année, révèle le spécialiste, estimant qu’une augmentation de production ferait du bien à l’économie du pays. Le secteur a besoin d’être développé dans tous les départements et le pays a du potentiel, croit l’entrepreneur, PDG de « Myèl Lakay /Miel Pur »
Près de 90 % de la reproduction des plantes sauvages à fleurs du monde est assurée par la pollinisation, 75 % des cultures vivrières également et 35 % des terres agricoles à l’échelle de la planète en dépendent. Les pollinisateurs ne contribuent pas seulement à la sécurité alimentaire, ils constituent aussi de véritables machines essentielles pour la conservation de la biodiversité. Par conséquent, un investissement dans l’apiculture est autant utile à l’environnement qu’à l’économie.
« Investir dans ce secteur c’est investir dans la biodiversité, c’est encourager un environnement vert », revendique Nesly Paul. Les problèmes de l’insécurité, de la disponibilité du miel dans des zones reculées, la baisse du pouvoir d’achat des ménages, sont entre autres les contraintes que rencontre la jeune entreprise.
Toutefois, parvenir à desservir entre 30 % à 40 % du marché de miel en Haïti et arriver à sensibiliser le maximum de gens possible sur le rôle et l’importance des abeilles pour l’environnement sont les principaux objectifs du PDG de « Myèl Lakay/Miel Pur » qui célèbre son tout premier anniversaire.
Entretemps, l’entreprise a déjà participé à deux concours, l’un pour la fin de l’année 2021, organisé par Prestige et Dynasty Hub dans le cadre du projet « Dekole biznis ou », et l’autre en mars 2022, organisé par Banj dans le cadre du projet « Haitian Leaders Impact Fund ». L’entreprise « Myèl Lakay/Miel Pur » a été classée respectivement parmi les 10 meilleurs projets et 18e parmi les 25 projets choisis.
Si d’autres mélangent leur produit ou encore vendent du miel importé, le PDG de « Myèl Lakay/Miel Pur » garantit un miel propre et de bonne qualité. De plus, l’entreprise utilise des ruches modernes pour la production du miel. « On vous vend le miel en toute transparence et en toute honnêteté », assure l’apiculteur.
Pour Nesly Paul, la question de l’environnement est l’affaire de tout le monde. Il se dit conscient que son entreprise à elle seule ne suffit pas dans la lutte pour préserver les abeilles. D’après lui, l’entreprise « Myèl Lakay/Miel Pur » est un premier pas dans cette lutte contre l’extinction des abeilles. « C’est notre tour de main pour empêcher que ça arrive », précise l’apiculteur qui appelle au passage l’État à travers les ministères de l’Environnement, de l’agriculture, les organisations écologiques et les autres apiculteurs, à se mobiliser pour jouer leur rôle.
Jusly Félix