Le Parc national urbain du Canapé-Vert a été déclaré « Aire protégée » par l’Etat haïtien dans un décret datant du 29 mars 2017. Selon l’arrêté publié dans le journal officiel Le Moniteur, en date du 7 avril 2017, il s’agit d’un vaste espace vert d’une superficie de 33,47 hectares situé sur le Mont Garnier dominant la place et le marché du Canapé-Vert. Plusieurs bureaux de services publics y sont logés. Ce patrimoine naturel et culturel est habité et entouré de constructions.
Environ 7 ans après, ce site reste mal connu par la communauté de Canapé-Vert. « Nous savons que ce territoire est un bien de l’Etat mais pas un parc national », se désole Simon, âgé d’une quarantaine d’années environ, assis avec quelques amis profitant de l’ombre.
Bien que des membres de la communauté ignorent ce qu’est un parc national et son importance, ils veillent à la protection du site. Diverses actions entreprises par la communauté peuvent en témoigner. « Nous n’abattons pas d’arbres dans la zone et si nous trouvons quelqu’un en train de couper un arbre, nous avertissons les forces de l’ordre », a informé Jacques, un des employés de l’Etat travaillant dans le bureau de la Direction départementale de l’Ouest (DDO), l’un des bureaux d’Etat logés dans l’espace, habitant la zone depuis son enfance.
Ce n’est pas seulement une lutte contre le déboisement qui est menée par la communauté mais également une lutte contre les déchets. Ils veillent à maintenir l’espace propre. De plus, ils ont l’habitude de cotiser pour nettoyer l’espace. « Parfois les habitants réalisent des travaux d’assainissement. »
« Cependant, les initiatives entreprises par l’Etat pour protéger la zone sont minimes », ont témoigné plusieurs personnes interviewées. En effet, les initiatives entreprises par la communauté pour préserver le parc restent insuffisantes. « Les arbres ne sont pas entretenus et avec le cumul des feuilles mortes et la présence d’activités humaines, cela reste un défi pour la communauté, qui sans les outils adaptés, ne pourra pas garder l’espace propre », ont-ils ajouté.
Pour Enock, gardien de la partie de l’espace où sont logés les services publics, habitant la zone depuis 15 ans, il s’agit d’un territoire protégé par l’Etat vu les restrictions imposées contre l’abattage des arbres et le contrôle un peu strict des constructions dans la zone.
Pour une meilleure implication de la communauté dans la gestion du site
« La raison qui explique la méconnaissance du terme « aire protégée » en Haïti, c’est par le fait que ce terme a été utilisé pour la première fois en 2013 », a jugé le directeur technique responsable de la coordination des aires protégées en Haïti à l’Agence Nationale des Aires Protégées (ANAP), l’agronome Prénord Coudo
En revanche, l’agronome Ematel Belance, agronome travaillant au ministère de l’Environnement (MDE), souligne que le problème réside dans l’éducation de la communauté. « Les autorités responsables n’ont pas pris le temps d’informer la population. Ce n’est pas un problème pour la population de s’intégrer mais souvent l’on oublie d’intégrer les véritables concernés. L’éducation de la population doit être un processus continu », a-t-il recommandé.
D’après l’agronome Prénord Coudo, cette zone a été déclarée aire protégée par l’Etat pour sa richesse en biodiversité et sa position. « Le parc constitue une sorte de poumon pour la zone métropolitaine », a précisé l’agronome Belance Ematel. Il a par ailleurs ajouté que la présence du parc est très importante pour la zone du Canapé-vert. « Le parc représente un refuge pour les espèces animales et végétales. Il peut servir de zone de reproduction pour certaines espèces », soutient-il. « Aussi, ces espaces servent à ralentir la force de l’érosion de l’espace, protège le sol et facilite l’infiltration de l’eau dans la nappe phréatique, a enchainé l’agronome Anderson Jean. De plus, la présence du parc purifie l’air et facilite l’apport en oxygène au bénéfice de la population avoisinante. »
Face au constat que les communautés ne savent pas toujours ce que sont les aires protégées, les spécialistes font des recommandations. « La gestion du parc doit être reconsidérée », fait remarquer l’agronome Prénord Coudo, soulignant que des actions de sensibilisation doivent être entreprises pour éduquer la population. Des structures, a-t-il aussi recommandé, doivent être mises en place pour une meilleure gestion de l’espace.
Les aires protégées sont classées par catégories. Et les parcs nationaux font parties de la catégorie II. Selon des informations disponibles sur le site de Haïti Climat, les parcs nationaux sont de vastes aires naturelles mises en réserve pour protéger le processus écologique, les espèces et les caractéristiques des écosystèmes de la région.
Evodie Melissa GASPARD et Jocelyn PIERRE
Une production d’ACLEDD avec le soutien financier de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL).