Les organisations Konbit Ayisyen pou Lojman Altenatif (KAYLA) et Kolektif Jistis Min (KJM) ont dénoncé le mardi 22 mars dernier lors d’une conférence de presse, la marchandisation de l’eau sur le territoire haïtien, le transformant en une denrée rare pour les populations, à l’occasion de la célébration de la 29e journée mondiale de l’eau, au local de la Plateforme haïtienne de Plaidoyer pour un Développement alternatif (PAPDA).
« L’eau destinée à la consommation est plus chère alors que leur potabilité est à questionner » , a déclaré Francia Pierrette, responsable de communication de Kayla qui, dès le début de la conférence, a contextualisé sur la situation alarmante de la vente d’eau en Haïti. « Plus que la moitié des eaux disponibles sur le marché haïtien ne sont pas potables. Elles contiennent des bactéries coliformes fécales (…). Dans les milieux ruraux, c’est encore pire », a-t-elle poursuivi.
L’accès à l’eau est de plus en plus difficile. Une bonne partie de la population rurale est obligée de parcourir des kilomètres en vue d’étancher leur soif. D’autres consomment des eaux provenant des sources parfois polluées. « À l’appui des recherches des experts en eau, la région nord et nord-ouest d’Haïti subiront de graves crises en eau », a-t-elle prophétisé. Par ailleurs, la responsable de communication Kayla, Mme Pierrette a souligné que l’implantation des zones franches en Haïti constitue un moyen d’empirer la problématique de l’eau. « Ces espaces ont une conséquence directe sur les nappes phréatiques. Leurs approvisionnements en eau sont à l’excès et déjà voués à l’échec. Car elles laissent joncher des produits chimiques qui contaminent l’eau de la nappe. Le parc Caracol et la compagnie Agritans sont deux exemples vivants ».
“Dlo se lavi, dlo vo plis ke lò”, a martelé pour sa part Franndy Lesperance, coordonnateur technique de Kolektif Jistis Min au cours de son intervention soutenant que l’exploitation des mines risque d’empoisonner de manière violente l’eau. « L’extraction des minéraux, des terres rares et des métaux dont le cuivre, le fer ou l’or constitue une véritable source de danger pour les humains ainsi que l’eau », a-t-il mentionné lors de sa prise de parole au cour de cette conférence de presse donnée à l’occasion de la journée mondiale de l’eau célébrée cette année autour du thème : « Les eaux souterraines, rendre visible l’invisible ».
Primo, le produit appelé cyanure se fixant sur les atomes du fer et/ou de l’or est réputé comme poison violent pouvant causer la mort presque immédiate d’un nombre important d’humains, a fait savoir M. Lesperance, rappelant que la mine d’or de Pueblo Viejo se trouvant à 100 kilomètres de la capitale de Saint-Domingue en République dominicaine est un exemple concret des pôles dangereux de l’exploitation des mines. Et pour revenir chez nous en Haïti, il a considéré les exemples de Mémé, mine localisée dans la commune des Gonaïves. Comme quoi, des études ont démontré, selon M. Lespérance que les dents noires des habitants de cette commune ne sont pas causées par la coloration, l’accumulation de tartre ou la pourriture, mais de préférence, dues aux conséquences de l’extraction des mines de cette zone laissant des séquelles.
Secundo, « 250 mille litres d’eau sont utilisés chaque heure pour une extraction de mines d’or », a certifié le coordonnateur de KJM. Et ces eaux usées capturées par la compagnie sont potentiellement dangereuses pour les humains, les animaux et les plantes. Elles seront filtrées vers des nappes phréatiques proches, ajoute-t-il. « Développer des secteurs miniers en Haïti, c’est empirer la potabilité de l’eau », a conclu M. Lesperance.
A travers le monde, pas moins de 2,1 milliards de personnes, soit 30% de la population mondiale, n’ont pas accès à l’eau potable salubre à leur domicile et plus du double ne disposent pas de services d’assainissement sûrs, révèle un rapport conjoint publié en 2017 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Unicef.
Dieulissaint Etienne