Haïti fait partie de la courte liste des pays au monde où l’insécurité alimentaire est très accrue. A cause des nombreux défis auxquels fait face le secteur agricole haïtien, l’autosuffisance alimentaire ne cesse de reculer d’année en année. Les produits agricoles issus du terroir peinent à concurrencer les produits importés faute du niveau de production en deçà de la demande locale. Pour débattre de cette question, l’émission Haïti Climat du jeudi 18 févier 2021 a reçu Daniel Jean-Baptiste, expert en coopération internationale et en projets humanitaires et de développement, autour du thème « les défis de la sécurité alimentaire dans le contexte du changement climatique en Haïti ».
Pour la période allant d’août 2020 à février 2021, 42% de la population haïtienne nécessite une action urgente, lit-on dans le bulletin « Panier alimentaire et conditions de sécurité alimentaire » du mois de janvier 2021 de la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA).
Par ici pour lire le dernier Bulletin du CNSA pour le mois de janvier 2021
Cette statistique concernant le nombre d’habitant touché par l’insécurité alimentaire en Haïti fait écho au chiffre fourni dans le dernier rapport du Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU) estimant que 4,4 millions de personnes nécessiteront une aide humanitaire au cours de l’année (selon l’aperçu des besoins humanitaires en Haïti pour 2021 qui doit paraître en mars 2021).
Le bas Nord-Ouest, les quartiers très pauvres de Cité Soleil, la zone côtière de la Grand-Anse et une bonne partie de l’Ouest sont en situation d’urgence. Il existe cinq phases quand on parle de l’insécurité alimentaire et Haïti se situe entre la phase 3 et 4 c’est-à-dire en situation urgente, mais cela ne veut pas dire que nous sommes exempt de la phase 5 qui est la phase de la famine, a fait savoir Daniel Jean-Baptiste.
La sécurité alimentaire est corollaire de la lutte contre l’insécurité alimentaire. Depuis bon nombre d’années, s’assurer de cette sécurité constitue un véritable défi pour les autorités haïtiennes. Manger tend ainsi à devenir un luxe pour une population dont les productions culturales sont destinées principalement à l’autoconsommation. L’insécurité alimentaire bat son plein et les cris de faim résonnent de plus en plus dans les régions susmentionnées. Le spécialiste a confié que le secteur agricole est très vulnérable aux aléas climatiques, et à cette vulnérabilité s’ajoute le manque d’investissement dans le secteur. Il n’y a pas de mesures d’accompagnement pour les agriculteurs car le secteur agricole n’a jamais été une priorité pour l’Etat haïtien, donc pour lui les défis de l’insécurité alimentaire restent de taille et sont difficiles à relever.
En ce qui a trait à l’aide humanitaire, palliatif contre l’insécurité alimentaire, le spécialiste a plaidé pour un meilleur contrôle tout en condamnant les mauvaises gestions de cette aide par les organisations non gouvernementales. Il faut que l’aide humanitaire cadre avec les besoins et les priorités de la population, et il incombe aux autorités nationales de s’assurer du respect de cette recommandation.
Les impacts négatifs sur changement climatique sur l’agriculture sont nombreux. Une grande majorité de cultures étant tributaires du climat, il y a donc lieu d’affirmer qu’il existe un lien de cause à effet entre la variabilité climatique et l’insécurité alimentaire. Mais, l’Etat haïtien n’arrive toujours pas à évaluer la portée de ce phénomène. Entre temps, la population vit dans une pénurie alimentaire aigüe. Nous nous tournons vers l’aide alimentaire ou l’importation pour la majorité de nos produits au lieu d’instaurer une véritable politique d’autonomie agricole. Sortir de cette spirale pauvreté, faim et dégradation environnementale n’a jamais paru autant hors de portée en Haïti.
Dans les studios de Magik 9, Valéry & Patrick présentateurs de Haiti Climat et l’invité du jour Daniel Jean Baptiste (au milieu)
(Ré) écoutez le podcast de l’émission avec Daniel Jean Baptiste
Kattia Jean François