Les conséquences de la dégradation de notre environnement sont multiples. Le secteur de l’eau en est l’une des principales victimes. La situation est à un point tel qu’on doit admettre qu’Haïti fait face à une grave crise de l’eau.
Le professeur Evens Emmanuel, Vice-recteur de l’Université Quisqueya et responsable du laboratoire sur la qualité de l’eau a été l’invité de l’émission Haïti Climat sur Magik 9 le jeudi 4 juillet 2019. Il a largement abordé la question de la crise de l’eau à laquelle le pays fait face.
À Port-au-Prince comme dans les villes de province, la crise de l’eau se fait sentir. Les paysans ont toutes les peines du monde à trouver de l’eau pour arroser leurs jardins alors que des inondations récurrentes détruisent nos faibles infrastructures et font pleurer les familles. Les éleveurs ont, de leur côté, toutes les peines du monde à trouver de l’eau pour étancher la soif de leurs animaux.
Il n’y a pas que les espèces animales et végétales qui payent les pots cassés de la crise de l’eau. Nous aussi, nous en souffrons grandement. Dans beaucoup de régions du pays, l’eau est devenue une ressource rare. Les gens, souvent des filles et des femmes, doivent marcher des kilomètres pour la trouver.
S’il est vrai que la crise de l’eau ne date pas d’aujourd’hui, on doit admettre qu’elle s’aggrave au rythme de la dégradation de l’environnement. A cela, il faut ajouter le phénomène El Niño et celui du changement climatique contre lesquels Haïti parait visiblement désarmée. A cause de ces deux phénomènes, Haïti connait de longues périodes de sécheresse ainsi que des cyclones et ouragans récurrents. Dans l’un ou dans l’autre cas, le secteur de l’eau est affecté. Avec les sécheresses, le précieux liquide est introuvable dans la mesure où nos rivières et nos autres cours d’eau sont à sec. Quand les ouragans ou cyclones frappent le pays, notre système d’adduction d’eau est souvent endommagé.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) reconnaît, de son côté, que la charge de morbidité associée au manque de ressources hydriques ou à leur mauvaise gestion est accrue lorsque surviennent des catastrophes naturelles. Ce qui peut avoir un impact direct sur les moyens de subsistance de la population. C’est ce qui arrive souvent en Haïti après chaque catastrophe naturelle.
Il n’y a pas que les catastrophes naturelles qui sont à la base de la crise de l’eau en Haïti. Notre rapport avec l’environnement est sans doute la cause principale. Nous oublions si tout est synchronisé dans l’écosystème. En construisant dans les bassins versants, en déboisant nos mornes et nos plaines, nous provoquons nous même la crise de l’eau. Comme si cela ne suffisait pas, nous exploitons les nappes phréatiques sans aucun contrôle. Voilà des faits qui doivent nous faire comprendre que le pire est à craindre en matière de l’eau en Haïti. Par nos mauvais agissement, non seulement cette ressource vitale diminue, elle est aussi contaminée. Voilà ce qui explique le fait que le business de l’eau potable est aussi en vogue en Haïti.
La crise de l’eau devrait préoccuper au plus haut point nos décideurs politiques ainsi que les citoyens. Pourtant, en dépit de la gravité de la situation, nous ne sommes pas encore là.
« Si rien n’est fait concrètement pour assurer une meilleure gestion de l’eau potable et faciliter son accès au plus grand nombre, Haïti risque dans 20 ans de se retrouver à importer de l’eau potable pour satisfaire les besoins élémentaires de sa population » (Jean Vilmond Hilaire)