L’émission Haïti Climat a accueilli le docteur David Noncent, le 28 août, autour du thème : « Le lac Azuéi : mémoire vivante de la variabilité climatique », un travail issu de sa thèse doctorale. L’expert a profité de cette tribune pour alerter et sensibiliser les autorités et les populations sur les enjeux climatiques en Haïti, soulignant l’importance de comprendre le passé pour mieux gérer le présent et préparer l’avenir.
Situé à la frontière entre Haïti et la République dominicaine, le lac Azuéi est le plus grand lac salé du pays et constitue un écosystème fragile mais riche en biodiversité. « Les lacs sont des archives naturelles, riches en informations. Le lac Azuéi est une boîte secrète : chaque couche de sédiment constitue une page d’histoire où le climat du passé est enregistré », a expliqué Noncent.
Pour ses recherches, le scientifique a analysé une carotte de sédiments remontant à environ plusieurs siècles. Cette technique permet de lire les couches successives de sédiment comme un véritable livre, chaque strate contenant des indices sur le climat à une époque donnée. Ses observations montrent que le climat d’Haïti a connu des périodes de sécheresse prolongée, suivies d’inondations, reflétant la variabilité naturelle du climat sur le territoire.
Le docteur a tenu à rappeler que la variabilité climatique est un phénomène naturel, mais que les activités humaines peuvent l’influencer et l’aggraver. « Nos modes de vie impactent négativement le climat. C’est pourquoi nous observons aujourd’hui des sécheresses prolongées, des inondations et d’autres catastrophes climatiques », a-t-il averti. Il a insisté sur le fait que les résultats de ses recherches ne sont pas seulement académiques, mais qu’ils ont des implications concrètes pour la gestion des ressources en eau, l’agriculture et la protection des populations vulnérables.
Comprendre le passé, a-t-il expliqué, est essentiel pour anticiper l’avenir : « Le paléoclimat nous aide à mieux comprendre le climat présent et à mieux nous préparer pour l’avenir. » Les données historiques du lac Azuei peuvent guider les autorités dans la planification de la gestion de l’eau, la prévention des inondations et la mise en place de stratégies agricoles adaptées aux fluctuations climatiques. Le chercheur a également insisté sur la sensibilisation des communautés, notamment sur l’importance du reboisement dans les zones exposées à l’érosion et aux phénomènes extrêmes.
Cependant, le lac et son environnement sont menacés par certaines pratiques agricoles autour de ses rives, qui accentuent l’érosion et perturbent l’équilibre écologique. « Construire une carte paléoclimatique permettrait de collecter davantage d’informations sur le climat passé et d’orienter les décisions présentes et futures », a-t-il ajouté. Selon lui, ces travaux peuvent également renforcer la prise de conscience collective sur la nécessité d’adopter des comportements respectueux de l’environnement.
Aussi, via ses recherches, il a rappelé que le lac Azuei n’est pas seulement un site naturel, mais une véritable mémoire vivante, capable d’éclairer les défis climatiques auxquels Haïti est confrontée aujourd’hui et demain. En ce sens, la science peut servir de guide pour mieux gérer les ressources naturelles et protéger les communautés vulnérables, tout en soulignant la responsabilité de chacun dans la préservation de l’environnement
Esther Kimberly BAZILE
